Pensamientos del mes de una coach perfectamente imperfecta, y en constante reflexión sobre su papel de madre, mujer, ciudadana.
A partir de ahora :
Je vais poster ici désormais : (ma page Instagram sur laquelle je tâtonne et expérimente textes, photos et vidéos :))
Mai - Septembre 2020 : back to french :)
Unschooling radical et confiance en soi.
C'est quoi, finalement, vivre, respirer, « libre et descolarisé(e) » ? Partir de soi, de son élan interne, être connecté(e) à son instinct et à ses intuitions profondes, de manière légère.
Ces mots, « la confiance », « la liberté », répétés à l'infini par divers politiciens ou pédagogues, au sujet de l'enfance, peuvent perdre toute leur saveur, selon l'intention qui y est portée en amont.
Pour sentir vraiment ce qu'est apprendre de manière autonome, ce « flow » que l'on peut ressentir quand on a l'impression que tout est aligné, à sa juste place, parfait, non pas d'une perfection organisée et manipulée, mais la fluidité de la vie qui coule, comme lorsque vous vous asseyez au bord d'un ruisseau, que vous voyez miroiter le soleil sur l'eau qui glisse, que vous entendez la musique douce du courant sur les pierres, vous, être, humain, à côté d'autres êtres, végétaux, qui vous offrent l'ombre, et la lumière, et l'air dont vous avez besoin pour nourrir votre esprit.
Je pense que mes voies dopaminergiques sont pas mal abimées. Ce sont des fibres de projections dans le cerveau, qui synthétisent et libèrent le neurotransmetteur qui est en lien avec les fonctions exécutives, les apprentissages, la motivation. Je vous rassure, je ne crois pas qu'elles soient beaucoup plus endommagées que la moyenne des adultes de ma génération, éduquées dans un bain de violences ordinaires, de contrôles, de systèmes de récompenses encore et toujours externes. Mais je peine à me défaire de cette compétition, comparaison, ce jugement de valeur (être mieux que, être le meilleur, être au top... ou n'être rien) qui est encore tellement ancré dans notre société, même parmi les familles IEF, qui sommes, -à force d'être pointées du doigt-, fières d'exposer que notre enfant a eu tel résultat, à tel examen, qu'il a réussi tel puzzle, de tant de pièces, alors qu'il n'a que tel âge... quel est l'intérêt en soi, si ce n'est, pour le parent, de dominer ses craintes (dopamine dopamine, post Facebook pour montrer à quel point « mon » enfant est intelligent sans école, dopamine dopamine, photo Insta pour prouver à quel point « mon » enfant est épanoui sans VEO, dopamine dopamine, pouces en hauts, cœurs, dites-moi que ce que je fais est bien, svp félicitez-moi à travers l'éducation et les résultats et le potentiel de « mon » enfant.)
Que se passe-t-il si on laisse l'enfant libre, si on lui fait confiance, et qu'on n'interfère pas avec ses centres d'intérêts, sans pousser, sans tirer, sans projeter ses propres peurs sur son développement et son propre rythme ? Que se passe-t-il s'il est « en retard » par rapport au socle commun, si ses goûts ne coïncident pas avec le programme préparé pour sa tranche d'âge, s'il n'est pas intéressé par la lecture ou par les multiplications ? Qu'est ce que ça vous fait, à l'intérieur de vous ?
Pour lui, c'est assez magique... il reste lui, il reste connecté à son essence, à son élan de vie, à ses passions, il peut papillonner ou au contraire rester une journée entière sur un même sujet. Il peut se sentir bien avec des personnes, qui sont plus âgées, ou plus jeunes, sans se sentir trop petit, ou trop grand, pour jouer avec elles, il peut apprendre ce dont il va avoir besoin pour grandir au moment précis où il le nécessite.
Mon fils de 5 ans a reçu des voitures « Hot Wheels » à Noël par son cousin. Il s'est passionné pour ces voitures américaines, à commencé à regarder des vidéos sur les circuits de la même marque, encore et encore, des chaînes parents-enfants en français, et en espagnol, où le père filme et commente les inventions de son fils pré-ado.
Il y a quelques jours, ils ont passé des heures, lui et sa sœur de 9 ans, à fabriquer un circuit dans le salon, fait de bric et de broc, de récupération de divers petits circuits. Je m'amusais de mon côté avec les dominos Pestas (ces petits bouts de bois colorés très relaxants et inspirants, c'est un investissement que je ne regrette pas), et ils sont partis avec l'idée de mixer le circuit de dominos, avec ceux de voiture, avec des objets de la maison... la table basse, les caisses de rangement de jouets... mais il fallait une pente assez forte pour que la voiture roule, et-ou que la force des dominos propulse assez fort la petite voiture, assez lourde par rapport à d'autres. Jusqu'où allait pouvoir aller le véhicule ? Et comment le faire aller plus vite, sans qu'il quitte la route ?
Je me suis soudain souvenue de mes cours de Physique-Chimie de 1èreS... le professeur n'était pas
méchant, mais il aimait jouer le rôle du prof strict, pince sans rire. Je l'aimais bien, même s'il ne m'enseignait rien, je ne comprenais pas grand chose à ses formules. Je me souviens de sa voix gentiment moqueuse, de son aspect très classique, de sa manière de dicter le cours en ponctuant les moments importants « encadrez-moi ça en rouge, c'est à savoir ». Pendant ce temps nous écrivions des cadavres exquis avec ma copine.
Dans ma mémoire reste ce dessin d'un vélo dans une pente, le calcul pour connaître sa vitesse, alors que le vent était contraire à sa direction... je ne me rappelle de rien d'autre, je m'étais demandé à l'époque à quoi ça pouvait bien me servir de savoir ce genre de choses quand je pédalais ?
Et pourtant ! Si ce cours m'avait passionné, si j'avais compris la théorie et que j'y avais vu du sens, aurais-je pu aider avec des calculs mathématiques mes enfants des années plus tard ?
Pendant que je réfléchissais, les deux ingénieur(e)s continuaient, concentré(e)s et motivé(e)s, à essayer sans relâche, un domino en moins par ici, un autre en plus par là pour soulever la voiture, un essai, ah non, pas assez fort, un autre, ah là c'est pas mal. Aucun demande de leur part.
Alors je reviens à la confiance. J'aurais pu aller le chercher, ce fameux théorème, les « aider », filmer le succès du parcours, m'enorgueillir sur les réseaux ou faire un article pour prouver que les enfants en unschooling sont tellement brillants, à 5 ans ils font de la Physique niveau lycée et du génie civil.
J'ai essayé de faire avec eux, puis je les ai juste regardé, j'ai savouré ce moment de complicité, de coopération, j'ai savouré mon moment à moi, sans sollicitations, j'ai souri à la pensée qu'ils ne m'auraient sûrement pas suivi dans mes équations, et qu'à côté de ça Alice parvient enfin à mettre sa tête sous l'eau et à nager, seule, et que cela vient de sa propre envie à elle, c'est sa fierté à elle. J'ai souri au fait que si je fabrique des parfums ou des savons avec elle, je dois tout reprendre à 0 sur la saponification, sur les produits chimiques et les molécules. J'ai eu une pensée un peu moins tendre envers le professeur de natation qui nous poussait dans le grand bassin pour apprendre à plonger et qui m'a empêché de plonger, de fait, pendant des années, jusqu'à ce qu'un ami de mes parents, très doux, me redonne confiance en moi.
La boucle est bouclée. La confiance, ça ne se décide pas, ça ne se mérite pas. Ça se prend.
« Comment t'as pris la confiance ! » Cette expression pour se moquer, plus ou moins gentiment de quelqu'un qui osait « trop », et dont j'usais et abusais pendant ces années avec mes potes de lycée, est-ce qu'elle s'utilise encore? Prenez-la, prenez la confiance, trop, n'attendez pas qu'on vous la donne, ni surtout qu'on vous la retire.
- Enero-abril 2020 : Las pantallas en mi vida cotidiana...
Vous trouverez l'article en français ici :
https://www.linkedin.com/pulse/à-lheure-de-lécole-la-maison-sharlotte-limodin-cases/
Diciembre 2019 : Escuchar y respetar a los menores de edad... las torpezas de los adultos.
Antes de ser madre, pensaba que no había muchas opciones delante de las lágrimas de un niño : o despreciar, dejar a la persona, y hacerla sentir peor que nunca, o consolar, es decir, hacer que el llanto pare, sea como sea. Lo primero, ciertas personas todavía lo llaman "educación" (el niño tiene que aprender la frustración, la vida es dura), lo segundo, me di cuenta, al tener mi primera hija, a pesar de mi crianza con apego, no es suficiente.
Hace 8 años, me sentía a veces como la peor de las madres... ¿Por qué lloraba mi bebe, si le daba el pecho, la llevaba con fular, dormía con ella, le daba masajes, le hablaba, había elegido dejar de trabajar... ? El padre a veces conseguía tranquilizar a esta pequeña persona misteriosa, pero no siempre. ¿Qué nos faltaba? Escucharla, escucharnos...
¡Fue como una revelación! Gracias a los foros de internet, empecé a leer muchos autores (Janov, Desjardins, Pikler, Miller, Dumonteil Kremer, etc.), y me atreví a empezar una terapia, con una profesional que no me cortaba cuando me ponía a llorar con lagrimones, al mismo tiempo que se me abría la mente como si por fin se terminara una ceguera que tenemos, a modo de supervivencia, cuando eres niño y a la merced de unos padres que no han podido - sabido cuidar y curar sus heridas de la infancia.
Ahora que soy coach especializada en el vínculo adulto - niño, me doy cuenta de los beneficios de las descargas de las emociones desagradables acogidas con apego y empatía, lo veo en mi día a día con mis 2 hijos, veo lo sanador y saludable que es poder "solo" aceptar que mis hijos necesiten "explotar" a veces, sin más, lo veo en mi misma también, como una higiene de vida, como otra manera de ver y sentir la vida.
Qué alivio y regalo poder « solo » escuchar cuando todo lo demás parece inútil, cuando no entendemos qué pasa, y ver luego el resultado observando a nuestros hijos centrados en si mismos, conociéndose y confiándo en nosotros, pudiendo ser realmente ellos con su sensibilidad.
Eso requiere mucho trabajo personal de parte del adulto, expresar y sacar nuestros propios traumas pasados, pero merece la pena, ¡ y tanto !
Para mí, es la única manera de entender lo beneficioso que es acoger las emociones de nuestros hijos, siendo acogido y escuchado nosotros también, por otro adulto formado a este proceso.
Sentir qué pasa cuando alguien nos escucha llorar en silencio, cuando nos dejamos temblar, gritar, y que el otro está presente y nos acepta así, en esta actitud vulnerable, frágil, delicada, auténtica. Sentir que el otro nos protege, nos comprende, con una mirada, quizá con una mano o unos brazos, si queremos, y con su paciencia activa. Acción pasiva del amor compasional.
Una vez que hemos vivido esta experiencia, podemos ofrecerla, antes no creo que sea posible. Conseguir estar allí, sin juzgar, aconsejar, controlar o parar esta emoción que nos puede asustar o enfadar, como un espejo. Pero sentir y sufrir lo que el otro siente no es empatía. Acogerlo sí que lo es.
Cuando me mandaron el vídeo viral del papa coach que se graba a él y a su hija en plena crisis emocional, pasé por muchos sentimientos opuestos. Ni siquiera lo quería ver entero, finalmente lo ví con mi marido, me emocionó mucho ver a este papá abrazar y esperar el final de la « rabieta », como nunca me lo hicieron a mi (estaba siempre sola), hablé con muchas madres y otras profesionales de la intención de este adulto, ¿por qué publicarlo en la red ?, incluso hablé con mi hija de 8 años, para saber como se sentiría ella si lo hiciera con ella...
Casualidad (no creo), tuve que acompañarla en una frustración intensa y larga poco después... gracias a esta confianza y esta seguridad que tiene en mí, pude sentir realmente el aspecto completamente indigno, irrespetuoso, incoherente, de haber, incluso solo pensado en ir a buscar una cámara para hacer otra cosa que estar con ella, mente, corazón, a 200 %, en ese momento tan íntimo.
Fui a ver los argumentos y otros vídeos de ese padre, y no me han convencido para nada... las excusas del azúcar, las pantallas (tengo otro artículo sobre este tema caliente), la edad, no explican por qué, cómo ese adulto aprovecha de su estatuto de profesional para hacer público momentos que no le pertenecen. Su hija no le pertenece, su hija no es él. Que se grabe él mismo en plena crisis, acompañado por alguién que le escucha, si quiere.
Dicho esto, entiendo el aspecto « positivo » que puede tener este tipo de imágenes en padres que desconocen esta alternativa virtuosa (escuchar con cariño las emociones desagradables es algo que pocos conocen todavía), o que no se atreven a probarla, vivirla, por miedo a sus propias emociones, a las consecuencias, en el niño, por qué se piensan que va a empeorar la situación...
A lo mejor, ¿quién sabe, hace unos 10 años, me hubiera venido bien encontrarme con este tipo de grabación, para reflexionar y abrir los ojos sobre otro tipo de educación ? ¿ Para dejar a mi hija que se desahogue, en vez de siempre controlarla y procurar que pare el llanto a toda costa ?
Sé que ha habido mucho debate en las redes sociales sobre este montaje. Padres entusiastas, otros indignados, profesionales encantados, otros desesperados. Me ha parecido discusiones muy interesantes y profundas sobre la crianza, el respeto y la consciencia de nuestro papel como adulto, y para concluir, me conecto a esta niña, le pido perdón, en nombre de todos estos niños heridos que seguimos siendo hoy en día, la mayoría de los padres y profesionales, todavía un poco torpes con nuestras intenciones, emociones. Ojalá lleguemos pronto a ver a los niños como personas enteras, con los mismos derechos que los mayores, igualdad en ser escuchado, respetado, cuidado. Manos a la obra, queda faena, aunque seamos cada vez más en darnos cuenta.
Noviembre 2019 : ¡ Por fin en castellano !
He tardado mucho, por miedo, por pereza, falta de tiempo, de energía, de confianza, en fin, mis razones conscientes e inconscientes tendré, pero al final lo conseguí : después de darle un nombre español a mi empresa, de acompañar por Skype a parejas hispanohablantes, de leer en castellano sobre crianza y educación, compartir, observar, vivir... por fin me lanzo, y daré el primer taller del otro lado de la frontera el miércoles que viene, día internacional de los derechos de los niños.
Estoy muy ilusionada, espero aportar mucha alegría, tomas de consciencia, ganas de avanzar, mejorar, crecer, a todos los padres con los que voy a tener el honor de hablar y compartir todas nuestras dudas y reflexiones sobre las relaciones entre adultos y niños, sobre la empatía, la crianza respetuosa, el apego, la libertad, la responsabilidad, y el bienestar de todos y cada uno. Hasta pronto familias :)
Coup de coeur littérature jeunesse : les lectures qui font du bien aux parents et aux enfants (été 2019)
C'est une rubrique que j'ai créée sur mon compte pro LinkedIn, et je partage les articles (2 pour l'instant) également sur Facebook, ainsi qu'Instagram
Je vous mets le lien ici les 2 premiers articles en question...
Patufet
Poudre d'escampette
Florence Foresti, ou le malentendu moderne de la « maman calme ». (juin 2019)
La première fois que j'ai vu ce sketch, je me suis dit « tiens, je devrais écrire un article sur ces 2 mamans et sur la parentalité dite bienveillante ». Puis Brigitte Guimbal en a parlé dans le dernier PEPS, et j'ai pensé « ah tiens tiens, il n'y a pas que moi y ai tilté ».
Il y a « la mère parfaite », la version blonde du fameux "papa" de Gad Elmaleh, elle ne s'énerve pas, elle arrive à tout, on pourrait penser qu'il s'agit de LA maman qui a suivi un stage de parentalité soit disant positive, ou se faire obéir tout en étant ferme MAIS respectueuse...
Puis il y a celle qui crie, qui est en retard, laxiste, girouette... vivante, authentique et humaine quoi.
La première nous énerve, nous fait culpabiliser, nous fait croire qu'on est de mauvais parents.
La 2è nous fait rire, on s'identifie, en tout cas perso ça m'a rappelé des souvenirs de maternelle...
Et bien je vais vous dire... pour moi, la mère la plus empathique, c'est la deuze.
Elle ne manipule pas, ne dresse pas, ne fait pas semblant, ne s'adapte pas à ce rythme de fou impossible à gérer (travaillez comme si vous n'aviez pas d'enfants, maternez comme si vous n'aviez pas de boulot à l'extérieur... et surtout souriez et prenez soin de vous! Merci l'injonction au bonheur inaccessible).
Laquelle des 2 peut le plus vite tomber en burn-out ? Je ne sais pas, ça va dépendre son son passif éducatif, de son travail sur elle en conscience, de la qualité de soutien non jugeant et bien informé de son entourage. On peut aussi passer sa vie en gentil zombie productif, comme l'explique si bien Thomas d'Ansembourg pour parler de la première partie de son existence comme avocat, avant de découvrir Marshall Rosenberg et la non-violence.
Ce que je peux vous dire, c'est que le message envoyé à l'enfant de la mère parfaite de Florence, c'est « sois sage, fais bonne figure, n'exprime pas tes besoins, ne montre pas tes émotions » : sinon ? Retrait de privilèges au moins aussi violent qu'un châtiment corporel, l'amour conditionné, la désapprobation de celui duquel vous êtes dépendant pendant au moins les 10 premières années de votre vie. Le tout sans hurler ni frapper. Pas besoin. C'est tout aussi nocif, flippant, voire aliénant.
Le message au 2è ? Et bien, la vie c'est la vie, on doit courir, on doit s'adapter, parfois on se plante, parfois c'est pas parfait, on change d'avis, on peut être du côté de son enfant contre des lois ou règles qu'on ne trouve pas forcément très cohérentes, et puis c'est pas si grave finalement, du moment qu'il y a de la complicité, du lien, du vrai, du profond quoi. Pas de la surface qui risque de s'écailler bien vite. Parfois on gueule, (après on s'excuse, on voit comment on peut réparer, ça met du temps, ou pas). Sans fard, sans retouches.
(Bon, en regardant ensuite un peu plus les autres sketches de Me Foresti sur la maternité, c'est un humour qui ne me fait plus autant rire car on voit l'enfant comme un débile, une charge, une mini-personne aucunement intéressante, je veux bien qu'elle ait besoin de relâcher ses tensions de maman par le rire comme une catharsis et une déculpabilisation de tout ce qu'elle ressent, après, j'aimerais bien lui montrer une conférence gesticulée de Camille Pasquier ou l'inviter à un cycle "Vivre et Grandir Ensemble" pour parents pour lui proposer de voir autrement la jeunesse, le jeu, les relations parents-enfants.
Le malentendu de ce début de siècle ? Qu'on veut le même résultat qu'a eu l'éducation classique sur nous (ou pas, selon qu'on ait eu un caractère plus ou moins rebelle), c'est-à-dire être plus ou moins coupé de ses besoins et de ses émotions, subir l'adultisme, être une classe dominée du fait de notre âge... avec douceur. Avec donc des violences plus subtiles, plus invisibles, mais pas moins profondes.
Un enfant élevé dans le respect et sans domination adulte (autant se faire que peut avec notre bagage émotionnel et éducatif, nos casseroles transgénérationnelles voire, soyons un peu fous, karmiques, avec le système sociétal patriarcal tel qu'il existe encore), est effectivement bruyant, épuisant, plein d'émotions jusque au moins 5-6, voire 7 ans et plus, a besoin de bouger, de contact, fait des erreurs, des expériences, des maladresses, et cela plusieurs fois par jour, tous les jours.
La difficulté pour nous adultes, femmes ? Accepter de ressentir tout le manque et les carences que nous avons eu enfants en voyant tout ce que cet enfant, notre enfant, peut faire et que nous n'avons pas pu, ou demande ce que nous n'avons pas osé demandé, et cela peut être douloureux, intenable.
Mes enfants sont instruits en famille, ils ont tous les 2 une grande sensibilité, à leur manière, et avec la mienne, j'ai l'impression d'être vidée à la fin de la journée, car les réactivations sont tellement nombreuses. Oui, il est plus facile d'aller au travail à l'extérieur et ne pas être confrontée quotidiennement à notre mémoire traumatique, aux dictats d'un certain féminisme « mais pense à toi ! » qui ne me parle pas. C'est plus facile en surface.
Mais quels monde ai-je envie de construire avec ma famille ? Quelle société je veux offrir à mes enfants, avec eux ? Quelles sont les adultes qui m'inspirent aujourd'hui, quelle enfance, quels parents ont-ils eu ? Et vous, êtes-vous prêts à changer vraiment de paradigme, ou voulez-vous juste changer la stratégie, mais avec le même objectif traditionnel d'avant-guerre ?
Vous dites :
— C’est épuisant de s'occuper des enfants.
Vous avez raison.
Vous ajoutez :
— Parce que nous devons nous mettre à leur niveau. Nous baisser, nous pencher, nous courber, nous rapetisser.
Là, vous vous trompez. Ce n'est pas tant cela qui fatigue le plus, que le fait d'être obligé de nous élever jusqu'à la hauteur de leurs sentiments.
De nous élever, nous étirer, nous mettre sur la pointe des pieds, nous tendre.
Pour ne pas les blesser. »
Janus Korczac, mort avec les enfants de son orphelinat dans un camp de concentration.
Et si j’avais suivi ce cycle avant de changer de métier ? (mai 2019)
Attention, qu’on me comprenne bien dès le début de ce témoignage : je ne regrette pas d’avoir évolué de « l’éducation » des élèves, qui a toujours été une vocation, vers l’accompagnement des adultes, sujet qui m’intéresse aujourd’hui tout autant que la pédagogie pour transmettre aux enfants et adolescents me passionnait à l’époque. Et en même temps, quand j’ai terminé ma propre formation, et ai lu le programme entier du cycle « Vivre et Grandir Ensemble, spécial enseignants », une petite nostalgie m’est venue, avec cette chanson magnifique de Bob Marley, « Redemption Song »[1].
Alors oui, j’ai suivi un autre chemin pour émanciper mon esprit, me libérer du mental, pour prendre conscience qu’une autre manière d’enseigner, d’apprendre et d’être en lien avec les autres est possible, souhaitable, bienfaisante, et toutes celles et ceux qui poursuivent cette passion et cette vocation devraient pouvoir y avoir accès !
Je me suis souvenue avec émotions de toutes ces années à tâtonner, partager, faire aimer, et je voulais vous les offrir, vous témoigner mes expériences et maladresses, mes succès et galères de jeune prof impulsive nourrie d’une génération Rap – Hip Hop (je suis née en 1981) assez violente verbalement bien que j’aie grandi au sud de la capitale française, à la campagne, loin des agressions urbaines qui existaient déjà à l’époque à quelques heures de chez moi au-dessus du périphérique.
Flash-back : donc c’est décidé, je vais passer 2 concours (CAPES et agrégation), et comme j’aime les jeunes et j’aime l’espagnol, et que je suis motivée, tout va bien se passer ! N’est-ce pas…
Comme je trouve qu’il n’y a pas assez d´écart d’âge entre mes potentiels futurs élèves (si on me donne des classes de terminale, je n’aurais que 4 ans de plus qu’eux !) et mon impétuosité juvénile et rebelle, je me dis que je vais aller mûrir quelques mois sous le soleil… me voilà en École Officielle de Langues en Andalousie, comme assistante de français.
Premières déconvenues : je me voyais déjà leur faire des conférences sur Toulouse-Lautrec et décortiquer des paroles de Zebda… ils voulaient juste parler de la pluie et du beau temps ! Je me rappelais avec délice des cours magistraux de mes enseignants de Khâgne sur l’histoire du Romantisme Lamartinien, ils voulaient apprendre à demander le prix d’une pression dans un bistrot sans se faire avoir sur le rendu de la monnaie. Bien sûr ! Ils étaient adorables et hyper motivés, des adultes pour la plupart, et je les remercie pour cette patience qu’ils ont eu face à mes exigences littéraires et illusions de petite nouvelle sans expérience du terrain « de l’autre côté ».
C’est là que ça devient « drôle », quand j’arrive en tant que stagiaire sur 2 établissements à Perpignan : lycée général et technologique, avec ces fameux jeunes qui avaient l’âge de ma petite sœur, et collège ZEP. Je suis en formation, je n’ai pas beaucoup de classes, pas beaucoup d’heures de cours, je crois que je ne m’en sors pas si mal. J’ai surtout un bon tuteur au collège (même si aujourd’hui je serai ravie de lui présenter ce que nous proposons en Parentalité Créative !) et des élèves vraiment sympas au lycée : quand je pense que j’ai donné un jour une punition collective le vendredi 16h avant les vacances, au lieu de regarder un film, car certains élèves n’avaient pas apporté leur matériel ! Je me souviens encore des rédactions de ces jeunes vraiment chouettes, je m’en suis rendue compte par la suite (certains m’avaient expliqué à l’écrit en quoi cette punition était « injuste », pour d’autres « vide de sens », pour d’autres encore bien informés « illégale » … bref, chapeau ! La majorité était quand même très adaptée et avait répété sans grande conviction, enfin j’espère, le fameux « c’est ma faute, j’le f’rai pu »). Mais l’équipe pédagogique et administrative était assez classique, les parents nous soutenaient… l’incident n’a pas fait de vagues. Moi il m’a marquée, j’en ai encore un peu honte, mais c’est en faisant des erreurs qu’on apprend, non ?
Direction la région parisienne, évidemment, remplaçante sur 2 collèges assez éloignés, ça se corse, les classes sociales ne sont pas les mêmes, je suis à temps plein, et encore très maladroite et pas à l’aise sur l’autorité que je veux incarner. Quand ça se passe bien, et bien ça se passe très bien ! Mais dès que les élèves « n’obéissent pas » … que faire ? Les conseils des collègues ne me correspondent pas forcément, d’autres m’attirent, mais je n’ose pas les imiter, et j’empire parfois les choses. Je tente pleins de méthodes, d’activités, très belles sur le papier, mais je ne m’adapte pas vraiment aux réels besoins de chaque classe, de chaque individu, même si j’ai l’impression pourtant de le faire. Je suis encore hors de moi, je ne sais pas encore vraiment les observer, les comprendre, les écouter. J’ai beaucoup d’attentes scolaires, et je me régale avec les ados qui rentrent dans le moule. Mais pour les autres plus réfractaires…et bien je fais mes armes comme on dit ! Je garde des souvenirs très émus, là encore, malgré tous les impairs que j’ai pu faire, le principal m’a soutenue, la fin d’année s’est très bien terminée et je suis restée longtemps en contact avec quelques-uns des élèves, je pense encore à d’autres en me demandant comment ils ont évolué, ont-ils trouvé la voie qui leur correspondait ?
Dernière académie, la Haute-Garonne, où je donnerai mes derniers cours, où je gagnerai enfin mon poste de titulaire, mais où finalement je commencerai à m’étioler, ou plutôt à me sentir à l’étroit.
Collège avec classes SEGPA pour commencer, quelle richesse ! Les conditions sont assez affreuses, les profs pas reconnus, l’équipe de direction pas vraiment à la hauteur ni compétente, la population à 75 % gitane. Je me suis régalée. (J’en ai bavé aussi, mais l’émotion qui me revient quand je repense à cette année est vraiment l’enthousiasme !)
Je me bats tous les jours pour accrocher les élèves, que ce qu’ils apprennent leur plaise, j’ai un gros challenge car il y a beaucoup d’absentéisme, mais l’équipe éducative (mes collègues sont professeurs des écoles) est vraiment top, elle connaît la réalité du terrain, je commence enfin à vraiment habiter mon métier, à montrer qui je suis vraiment, ou devenir qui je voulais être, comme a écrit un jour mon ami Friedrich[2].
Mes dernières années, les moins intenses, et en même temps les plus enrichissantes sur ma pratique d’enseignante, se passeront dans un lycée général et technologique. Je commence à passer de plus en plus de temps sur les réseaux sociaux et forums de profs, je découvre le GFEN [3]et le mouvement des Colibris qui m’inspirent énormément, et je mets en place de vraies « réformes » profondes dans ma manière d’être et d’enseigner, ce que je résumerai aujourd’hui à 2 actions internes finalement : lâcher et me relier. Lâcher de nombreuses croyances sur la discipline, sur les acquisitions et les programmes, sur tout ce que je suis censée apporter de manière formelle à mes classes, et je me relie. Je me relie vraiment à eux, à elles, à ce qu’ils sont, ce qu’ils veulent, ce qui les fait vibrer et ce qui les handicape, et je fais du sur-mesure, je les aime vraiment, je n’ai plus d’attentes sur eux.
Cela passe par de nombreuses vagues, tensions, dépressions, exaltation, et en même temps je sens de plus en plus que ma place est ailleurs, qu’il faut aller plus à la source, aller rencontrer les parents, dans un autre contexte que cette relation de lutte mêlée de crainte « parent-prof » pas toujours heureuse. Je deviens moi-même mère, et un autre univers, une autre dimension s’ouvrent à moi. J’ouvre les yeux sur le lien entre « amour » et « châtiments » en France.
Je m’arrête là, car c’est le début de la fin en tant qu’enseignante, j’ai plusieurs opportunités pour me reconvertir en formatrice pour adultes, et je fonce (communication, non-violence, alternatives aux punitions et force du lien et de l’attachement pour grandir, plus, cerise sur le gâteau, neurosciences, tout y était, je devais juste déménager et trouver ma place).
Comme je l’avais écrit à l’époque où je suis partie de manière très précipitée (une soudaine mutation de mon conjoint à l’étranger) pour dire au revoir à mes collègues, je suis d’une infinie gratitude pour toutes ces rencontres, tous ces conflits, tous ces chemins croisés, ils m’ont permis d’en être là maintenant à vous écrire, à vous proposer ce stage magnifique, joyeux et intense. Les élèves m’ont nourrie et j’espère leur avoir apporté la moitié de ce qu’ils m’ont offert, en remise en question, en développement personnel, en épanouissement, en kif !!! Je leur demande, sincèrement, une dernière fois pardon pour mes paroles brusques, mes blagues pas très drôles (comment manier l’humour et la vanne quand on a le pouvoir et l’autorité de l’adulte enseignant ? comment savoir recevoir la fraîcheur et l’intelligence vive d’une jeunesse peut-être pas respectueuse, mais sûrement car non respectée ?)
Elisa, Yann, Aurélie, Moussa, Elyaisse, Grégory, Manel, Maxime, Marion, Kloé, Raquel, Christel, Montserrat, Marie, Abdou, Lucie, … les noms et prénoms ne me reviennent pas, tous les visages par contre restent gravés dans ma mémoire. Et la joie est d’autant plus grande quand on se reconnaît, même 10 ans plus tard, à des kilomètres de l’école, dans un restaurant où vous travaillez, une station-service, à la terrasse d’un café, et que votre sourire illumine mon cœur.
Pour vous toutes et tous, je vais proposer et animer cette formation de qualité et indispensable de nos jours pour offrir à la société des citoyens responsables, conscients, heureux, apprenants comme enseignants.
[1]https://www.franceculture.fr/emissions/les-conseils-du-week-end/lhistoire-dune-chanson-lhistoire-dun-film-et-lhistoire-dun-livre[2]https://fr.scribd.com/document/380214591/NIETZSCHE-deviens-ce-que-tu-es-docx[3]http://gfen.langues.free.fr
Tranche de vie de coach parentale et apprentie écolo. (mars 2019)
Maintenant que je suis formée professionnellement en neurosciences affectives et cognitives, en théorie de l'attachement, en psychologie positive, en cnv, suivie personnellement par une thérapeute (supervision et analyse de pratique), j'ai parfois l'impression d'être un tabacologue écologiste du siècle dernier au milieu de fumeurs qui jettent leurs mégots dans le caniveau, avec en plus la meilleure intention du monde (ils ne le jettent pas "par terre"). Les gens savent que c'est mauvais pour la santé, mais ils ne savent pas bien par où commencer. Ou alors ils ne le savent même pas, refusent encore d'y "croire", que ça dépend des personnes, comme s'il s'agissait encore de croyances ou que les effets secondaires et conséquence de la tabagie ne passeront pas chez eux. Et oui, on a maintenant des affiches dans toutes les salles d'attente de pédiatrie et de maternités sur les dangers de secouer un bébé, on n'en a pas encore sur les risques et méfaits avérés de ne pas écouter son enfant avec attention et empathie. Le soutien à la parentalité bienveillante reste quelque chose d'alternatif, une "possibilité" au milieu de tant d'autres, comme un choix et non un droit des enfants.
Cela donne lieu, pour moi, dans mon quotidien de citoyenne lambda, à des moments de haute voltige émotionnelle, parfois de communication maladroite, de frustration énorme, quand tel parent tire l'oreille de son enfant dans un café, quand telle amie m'assure avec un sourire que son bébé va s'endormir après 10 ou 15 minutes de pleurs, quand telle maman lors d'une rencontre associative contrôle tellement tous les faits et gestes de ses enfants qu'ils se retrouvent enfermés dans des cases de frères bagarreurs et ne leur laisse même pas l'ombre d'une possibilité de médiation et d'empathie entre eux de manière autonome et créative. Cela leur laisse seulement le sentiment d'incompétence, de subordination à la mère qui a la solution et le dernier mot, de rivalité et de compétition à celui qui se fera le plus ou le moins disputer. Et tout cela devant le regard ébahi et admiratifs de nombreuses grands-mères et jeunes mamans qui pensent à quel point elle "gère bien" cette situation avec fermeté et autorité, sans (trop) crier, sans punir, avec des poses de limites claires et sans appel.
Et moi je me liquéfie, je me connecte aux besoins de ces petits, d'être entendus, d'être respectés dans leurs rythmes, les résultats de cette "éducation avec amour et fermeté, cadre", blablabla, je revois M.Banks dans sa maison anglaise à discuter avec Mary Poppins.
Et l'apprenti écolo, convaincue des bienfaits de la permaculture qui vit en moi depuis toute petite se dit "Comment arroser une terre aride, brûlée par trop de soleil, asséchée par manque d'ombre qui a manqué d'eau depuis si longtemps qu'elle ne sait même plus qu'elle en a besoin pour redevenir fertile ? Je ne peux pas planter de graine là maintenant tout de suite, ça serait bien trop prétentieux, je ne peux pas non plus balancer un arrosoir d'eau, je risque l'inondation à coup sûr".
Non, quand je me reconnecte humblement à cette petite fille qui avait besoin d'un amour inconditionnel et d'une écoute empathique à une époque où Dolto ébauchait les timides premières avancées sur les émotions des enfants dans une France tellement imbibée de psychanalyse freudienne et où l'enfant devait encore être élevé à la dure, mené à la baguette, je me dis que je vais y aller tout doux, voir tout d'abord ce qu'il reste encore à soigner chez moi, et y aller goutte à goutte, tel le colibri de la jungle en feu, parce que je sais que nous sommes de plus en plus de colibris dans ce pays en "presque guerre civile" et fracture sociale démesurée , et je me rends disponible, plus que jamais, à tous ces parents aimants (nous le sommes tous, c'est une évidence pour moi) qui vont, tôt ou tard, à leur rythme, plisser des yeux et réussir à les ouvrir malgré ce soleil brûlant en plein hiver, et s'ils ont envie, besoin, d'un peu d'ombre, de fraîcheur, je serai là pour qu'ils viennent reprendre des forces, se ressourcer et repartir plus conscients, plus confiants en leur capacité de parent respectueux et bienfaisant, comme tout parent qui veut, c'est sûr, que son enfant soit heureux.